Trahisons
Chapitre 22
Paul avait pris la décision d’amener qu’Émile Vadnais pour qu’il reste
en garde à vue
pour une
première période de quatre-huit heures, au moins le temps de voir les choses un
peu plus clair.
Le pasteur Bellavance prend le parti de son paroissien :
-Mais vous aviez dit que…
-Monsieur Bellavance, je veux
résoudre ce crime et je le ferai; je sais que cette décision vous déplaît, je
me doute même que cette décision ne va pas améliorer votre opinion sur la police
ni sur moi et sur le monde entier, mais je l’ai prise et elle va rester.
Monsieur Vadnais, veuillez nous suivre dans la voiture.
Et Roxanne était
intervenu :
-Attend; viens dehors avec moi.
Père et fille étaient sortis de l’appartement. Ils avaient discuté
pendant un moment et finalement Paul s’était rangé à l’argumentation de
Roxanne.
-Ça va; vous pouvez rester ici monsieur Vadnais; mais vous ne pouvez
quitter la région pour les prochains jours. Monsieur Bellevance, je veux que
vous vous en portiez garant.
-Je ne comprends pas exactement, mais, oui, je veillerai à ce qu’Émile
ne quitte pas la région avant tout nouvel ordre.
Sur le chemin du retour :
-Comme ça tu veux retourner à l’école confronter Mélissa ? Pour toi,
c’est elle la coupable...
-Oui; pour moi, c’est Mélissa qui a poussé Joannie par-dessus la rambarde
du pont de la Chute Albert. J’en mettrais ma main au feu.
-Ça faisait partie des hypothèses, mais il faudra le prouver; ce n’est
pas gagné.
-Non, c’est vrai; mais je crois que j’ai quelqu’un qui pourra m’aider.
-Son ex-petit ami ? Cet Alexandre ?
-Non, pas du tout. Demain, tu viens avec moi à l’école.
-Oh la la ! Tu me donnes un ordre ?
-Exactement !
Le lendemain, tôt dans la matinée, Paul et Roxanne se sont rendus à
l’école Jules-Chiasson de Lachute. Paul reste dans la voiture, prêt à venir dès
que Roxanne fera appel à lui. Celle-ci se rend tout d’abord chez le directeur
Raymond Riendeau.
-Encore vous !? Qu’est-ce que vous cherchez encore ? Est-ce que votre
enquête progresse ? Encore que j’aimerais bien que tout cela soit terminé !
-Bonjour à vous aussi, monsieur Riendeau. Nous avons plusieurs morceaux
du casse-tête, mais il nous en reste encore
quelques-uns à trouver, et pour cela j’aurais besoin de l’une de vos profs.
-Ah oui ? Et de qui ?
-Je voudrais parler à madame Tessier.
-Je suppose que je dois la faire venir.
-Bonjour, madame Tessier.
-Bonjour… euh, Roxanne c’est ça ? Allons dans mon bureau.
-Oui. Maintenant que nous seules, je peux vous parler franchement. Je
suis persuadée de connaître la personne coupable du meurtre de Joannie Lemieux;
c’est un étudiant de cette école, plutôt une étudiante, mais je ne peux
l’accuser formellement sans aveux, et j’ai besoin de votre aide pour obtenir
ces aveux.
-Il s’agit de Mélissa, n’est-ce pas ?
-Oui, c’est ça. Elle a été la dernière personne à avoir vu Joannie
vivante, mais de plus, elle a menti plusieurs fois et à plusieurs personnes,
aux psychologues et à vous aussi, probablement.
-Oui, c’est vrai. Tout son comportement est irrationnel.
-Voilà ce que nous allons faire. Nous allons la faire venir ici et vous
les poserez les questions suivantes. À moi elle ne répondra jamais la vérité,
mais à vous, c’est possible. Je serai présente dans ce coin, elle me verra
quand elle entrera, mais j’essayerai de me faire oublier et, c’est vous qui
l’interrogerez afin de lui faire avouer… Je vois que vous hésitez…
-Oui, vous me faites jouer un rôle qui n’est pas le mien.
-Mais sachez que c’est pour son bien. Nous pourrions obtenir ses aveux
d’autres façons, et nous le ferions, mais avec plus de conséquences négatives. Et
c’est le bien de tout le monde aussi; il faut que cette école retrouve sa
sérénité.
-C’est vrai. Je vais la chercher.
Mélissa est entrée comme une
sorte d’automate. Elle s’assoit sans sourire, sans même remarquer Roxanne.
-Mélissa, dis-moi : est-ce que Joannie t’avais invitée à cette
église, celle pour laquelle elle chantait ?
-Oui, elle m’a invitée à y aller. Elle disait qu’on y chantait des
chants sur Jésus, qu’on faisait de la bonne musique; elle aimait ça. Elle avait
une belle voix et le responsable lui avait dit qu’elle pourrait chanter avec le
groupe, sur la scène ! C’est sans doute ça qui l’a attirée. Oui, elle voulait
que je vienne, au début. Les dernières fois, elle insistait beaucoup; elle…
elle me disait que notre serions encore plus de bonnes amies, les meilleures
amies du monde, que c’était beau, que nous pourrons y aller ensemble. Moi ça ne
m’intéressait pas; je trouvais que c’était du harcèlement. Puis elle a arrêté…
jusqu’à…
-Jusqu’à ce rendez-vous sur le pont de la Chute Albert, c’est ça ? Le soir
où vous vous êtes rencontrées sur le pont de la Chute Albert, elle t’a dit que
vous ne pourriez plus être amies c’est ça ?
-Non…. Non…
-Elle t’a dit quelque chose
comme elle était obligée de couper les liens, qu’elle ne pouvait plus te voir;
on lui avait dit qu’elle n’avait pas le choix; comme elle l’avait dit dans la
journée à Alexandre ?
-Non… elle… elle…
-Elle quoi…
-Elle voulait qu’on parle des
costumes de Halloween…
-Mélissa, ça prend cinq minutes pour
parler de costumes de Halloween et vous êtes restées entre trente et quarante
minutes sur le pont; c’est une longue discussion pour de simples costumes de
Halloween, non ?
-Je ne voulais pas…
Roxanne murmure : « Tu
ne voulais pas quoi… » ce que répète madame Tessier.
-Je ne voulais qu’elle me
quitte… je voulais qu’on reste des amies, je voulais pas qu’on se voit plus… Ça
aurait trop dur de se voir à l’école et de ne pas pouvoir se parler !
Roxanne murmure à nouveau :
« Et ça t’a mise en colère… »
-Oui… j’étais en colère !
J’étais en colère contre cette maudite église ! C’était affreux… Comment on
peut demander ça à des amies ? De plus jamais se voir ?
Roxanne s’est graduellement
rapprochée.
-Oui, Mélissa tu était en colère
contre l’église… Rappelle-toi exactement ce que tu as dit à Joannie…
-Je lui ai dit que ça ne se
pouvait pas; que je l’acceptais pas, que ça se pouvait pas. Je criais; je
pleurais et elle aussi elle s’est mise à pleurer. Alors…
-Alors quoi ?
-Alors… alors… elle a arrêté
elle s’est retournée d’un seul coup et elle est partie; elle m’a tourné le dos.
Elle s’en allait !
-C’est tout ?
-Oui, c’est tout. Je pouvais
plus rien faire…
Madame Tessier reprend la
parole :
-Tu es sûre que c’est tout ? Je ne te crois pas.
-Je suis repartie chez moi !
-Je ne te crois pas Mélissa !
-Je suis rentrée chez moi ! C’est vrai ! Mais c’est vrai je l’avais
poussée en bas du pont !! C’est vrai ! Je voulais pas, madame Tessier, je vous
jure que je voulais pas ! C’est à cause de celle maudite église ! Moi je
voulais pas ! Je voulais rester son amie ! Je voulais pas ! Mais j’étais
tellement fâchée ! Je savais pas quoi faire ! Je sais pas pourquoi j’ai fait ça
! Je boulais juste qu’on reste des amies… J’avais tellement de peine et j’ai
encore tellement de peine !... Je voulais pas.
Mélissa pleure à gros sanglots. La professeure de français la prend
dans ses bras.
-Je voulais pas madame Tessier, je vous jure que je voulais pas.
Madame Tessier a aussi les yeux baignés de larmes :
-Je sais Mélissa; je sais que tu ne le voulais pas. Je te crois.
Et Roxanne également s’essuie les yeux; elle prend son cellulaire et
appelle son père.
Fin
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