lundi 14 avril 2014

Un moment de grâce…

                C’était un grand poète (mais je devrais écrire : c’est un grand poète… car il est toujours vivant) et un chansonnier hors norme, déjà célèbre, déjà immortel, et je voulais voir en spectacle au moins une fois. Je l’ai revu en spectacle deux autres fois ensuite, mais ça s’est passé il y a plusieurs années et… c’était la première fois.
J’avais invité une amie à venir avec moi pour ne pas vivre seul ce moment qui serait, je le savais, inoubliable. J’étais fébrile, tremblant comme un jeune marié. Il est arrivé sur scène, un peu échevelé, mais avec un sourire radieux, étincelant, qui nous illuminait le cœur et l’âme, comme si c’était lui qui éprouvait le plaisir immense d’être là, d’être avec nous, comme si nous l’honorions de sa présence, comme quelqu’un qui ne reçoit pas souvent de la visite et qui est tout en joie d’en recevoir, comme quand  on aime à la folie. Et pourtant, quels plaisirs auront été les nôtres de le voir et de l’entendre pendant plus de deux heures ! J’étais perdu dans cette foule compacte et bigarrée, mais c’est pour moi, comme pour chacune des autres personnes de la salle qu’il était là, qu’il était venu, qu’il était venu chanter comme lui seul peut le faire.
Le poète, et chanteur, a interprété quelques-unes de ses chansons que nous  connaissions par cœur et nous buvions comme un verre du meilleur cru chacun de ses mots; puis quelques-unes de son tout dernier disque (c’était encore le temps des « microsillons » que les moins de vingt ans…).
Chaque nouvelle chanson était un véritablement enchantement.
Et c’est alors qu’il s’est nous a offert un monologue que personne ne voulait entendre se terminer pour nous expliquer qu’il avait besoin de nous pour chanter cette prochaine chanson; une chanson qu’il nous offrait, que nous nous offrions mutuellement, qu’il offrait à ses compatriotes comme une perle de grand prix parmi toutes les autres qui sont aussi parfaites.
-Alors maintenant, on va répéter les mots du refrain… a dit le poète.
Et j’y repense encore avec un ravissement irrépressible. Nous allions chanter avec lui ! Nous allions chanter ses mots !
Et voici ces mots qu’il a chantés en premier et qu’il nous a fait reprendre d’un seul cœur et de plusieurs voix :
« Nos amours, nos travaux, même le chant d’un oiseau,
Ton cœur, mes mots, font tourner le monde. »
Et ce poète, avec qui nous avons chanté, c’était monsieur Gilles Vigneault.
                Moment, torrent de grâce…



1 commentaire:

  1. merci David,
    tu m'as fais revivre un superbe concert vécu dans les années 80 avec ce farfadet sublime qu'est Gilles Vigneault.Des les premières lignes de ton texte j'ai de suite pensé à lui car je revivais l'émotion de cette soirée inoubliable.Chapeau bas l'artiste!

    RépondreSupprimer